dimanche 14 novembre 2010

Y'en a marre

On est habitué en Haïti à la perpétuelle « autodéresponsabilisation » des (ir)responsables, au « je m’enfoutisme » de l’élite économique, aux incessantes palabres de ceux qui font valoir leurs activités comme l’exercice de l’intelligence au sein de la société haïtienne. Exercice de l’intelligence, si l’on se fie aux résultats sociopolitiques et économiques de ces 30 dernières années, qui tarde à produire des résultats concrets perceptibles par tous, à quelque niveau que ce soit. Cette déresponsabilisation collective, dont la forme la plus primaire et la plus idiote s’exprime ainsi : « je suis un intellectuel, je ne fais pas de politique », a servi à justifier les occupations incessantes dont le pays est l’objet depuis 20 ans. Le choléra qui sévit actuellement en Haïti est le résultat de l’occupation en cours, la manière dont il est traité résulte dune collusion entre l’ONU, le gouvernement haïtien et les médias.

L’occupation s’inscrit dans le cadre d’une transformation des modes d’intervention des puissances occidentales dans les affaires du monde ces 50 dernières années. A l’échelle nationale un nombre croissant de prérogatives de l’Etat est sous-traité par des firmes privées. L’idéologie néolibérale a fini par envahir l’Etat - dont la gestion se fait de plus en plus sous la forme de celle des entreprises - et l’ensemble de ses actions. A l’échelle internationale, l’ONU devient la « sous-traitante officielle » des Etats puissants, notamment les 5 permanents du Conseil de Sécurité. Elle permet de légitimer des interventions internationales qui n’auraient pu l’être sans susciter la résistance des populations. Des déséquilibres énormes et des inégalités à l’échelle planétaire dus à la globalisation, qui auraient pu et dû susciter le soulèvement des peuples, sont gérés par la sous-traitante des Etats puissants qu’est l’ONU. Et le fait que cette dernière soit officiellement considérée comme la représentante de tous les Etats (peu importent leurs capacités), permet de faire souvent passer comme une lettre à la poste les ingérences des Etats puissants (Etats universels par excellence) dans les affaires intérieures des Etats « altérisés, (c’est-à-dire sans capacités) », ingérences sous-traitées et orchestrées par l’ONU.

Dans le cas haïtien, les Etats puissants, avec la participation des Etats de second rang qui en profitent soit pour fournir une source de devise (si mes informations sont bonnes, un soldat étranger gagne plus de 6000 dollars US par mois en Haïti) non négligeable à leur armée pauvre, soit pour se montrer utiles aux yeux de leur puissants homologues, utilisent l’ONU pour signifier aux élites haïtiennes leur nullité. Cette « nullité » et « l’irreponsabilisation » des responsables haïtiens sont instrumentalisées par les Etats puissants afin de prouver au monde entier qu’Haïti est incapable de se prendre en charge. Vu qu’ils sont bienveillants et de surcroit altruistes, ils investissent à travers l’ONU afin de « stabiliser Haïti ». Le terme « stabilisation » utilisé dans l’acronyme MINUSTAH (Mission des Nations Unies pour la Stabilisation d’Haïti) annonce l’intention des Etats puissants de demeurer longtemps en Haïti. Car par définition la stabilisation est processuelle. Nul ne sait la délimiter dans le temps. Pire encore, l’action de l’ONU en Haïti ne va nullement dans le sens de ce qu’elle aurait appelé la responsabilisation des (ir)responsables haïtiens. Pour les Etats-Unis, il est moins couteux politiquement et économiquement de garder l’ONU en Haïti aussi longtemps que possible que de prendre le « risque » de se laisser envahis par la pauvreté, et tout ce qu’elle comporte, en provenance d’Haïti. La responsabilisation des (ir)responsables haïtiens est trop hypothétique pour s’y adonner tout de suite.

Toutefois, l’épidémie du choléra qui sévit actuellement en Haïti et qui a fait déjà plus de 900 morts vient de faire une nouvelle révélation :l’ONU est au moins aussi irresponsable que les irresponsables haïtiens qu’elle prétend responsabiliser !

Ok, personne n’est dupe. Si l’ONU savait stabiliser un pays déclaré instable, ça s’saurait, me diriez-vous. Ses expériences, notamment africaines, sont là pour décrédibiliser quiconque voulant aller dans le sens opposé. Mais le problème est que toute la machine de légitimation de la présence de l’ONU en Haïti était montée à partir de « l’irresponsabilité manifeste » des responsables haïtiens, qu’il faut à tout prix responsabiliser pour le plus grand « bien des haïtiens ». C’est l’irresponsable qui est chargé de responsabiliser d’autres irresponsables. Récapitulons pour ceux/celles qui n’ont pas suivi toute l’histoire.

La semaine du 18 octobre (2010) des cas de décès vraisemblablement dus à une « forme de diarrhée » sont déclarés dans l’Artibonite. Le jeudi de la même semaine, la presse locale rapporte que : « Les premiers résultats obtenus suite à des analyses en laboratoire montrent qu'il y a une poussée de choléra » dont le type est encore ignoré. Le gouvernement ne semble pas prompt à réagir. Quelques jours plus tard, des mirbalaisiens (Centre) accusent un contingent de l’ONU d’être à l’origine de la maladie. Des enquêtes (photos et vidéos à l’appui) montrent que des troupes de l’ONU déversent directement leurs eaux usagées dans les rivières utilisées par la population locale. L’ONU ne tarde pas à démentir ces informations, malgré l’accumulation des preuves. Les médias (étrangers surtout, mais pas seulement) de leur coté, trouvent un lien de causalité direct entre l’apparition du choléra et le séisme du 12 janvier. Or les régions où l’épidémie a été déclarée n’ont pas directement été frappées par le séisme, contrairement à la capitale (où le choléra a mis du temps avant de faire son apparition). Dès lors comment explique-t-on ce lien de causalité ? Il semble que ce lien de causalité se justifie par la recherche d’une information sensationnelle qui aille dans le sens du séisme, présentée comme la continuité du malheur qui frappe Haïti. A part la chaine Al Jazeera, rares sont les médias étrangers qui sont allés à l’endroit où les premiers cas ont été signalés et où la MINUSTAH est accusée de contaminer les rivières.

Le gouvernement haïtien de son coté semble soutenir l’ONU, en n’ayant cure du sort du peuple, qui refuse d’assumer ses responsabilités dans cette affaire. Les faux technocrates de Port au prince, préoccupés par la sauvegarde de la « politique du ventre » qu’ils mènent depuis très longtemps, préfèrent s’allier à la sous-traitante des Etats puissants au détriment du peuple. Ceux qui pouvaient, peut être par naïveté, croire encore en un minimum de responsabilité de l’ONU en Haïti se trouvent devant le fait accompli.

L’avenir d’Haïti ne se dessinera plus dans les hôtels 5 étoiles où des technocrates prétendent prendre des décisions au nom des haïtiens qui croupissent sous les tentes, il passera inévitablement par le soulèvement des camps de tentes, par l’alliance de ceux qui n’ont rien, les « sans part » comme dirait Rancière, et ceux qui survivent à peine. C’est cette réunion qui pourra responsabiliser les irresponsables (qui se transformeront ou s’en iront). L’alliance entre irresponsables « autodéresponsabilisés » et irresponsables « autoresponsablisés » qui prétendent responsabiliser les autres ne font qu’accélérer la descente aux enfers d’Haïti. Crions notre ras-le-bol des camps de tente aux locaux de la MINUSTAH en vue d’une Haïti enfin dirigée pas des responsables !

mardi 20 avril 2010

L'approche des choix rationnels et les paradigmes traditionnels en RI

En quoi l’approche des choix rationnels diffère-t-elle des paradigmes traditionnels en Relations internationales tels que le réalisme, le libéralisme ou l’institutionnalisme libéral ?

David A. Lake et Robert Powell voient dans les différentes divisions subsistant au sein des Relations internationales un blocage au progrès de la connaissance dans ce champ. C’est pourquoi ils se proposent de « pull together many diverse strands of existing theory and research in international relations[1] » dans ce qu’ils appellent une approche de Choix stratégique. Selon eux, les choix des acteurs, qu’ils soient étatiques, militaires, entrepreneurs ou autres sont souvent stratégiques. « each actor’s ability to futher its ends depends on how others actors behave, and therefore each actor must take the actions of others into account. [2]».

On ne peut comprendre la coopération internationale sans la prise en compte des choix stratégiques des acteurs et l’interaction entre les différents choix. Il s’agit là d’une première ligne de démarcation majeure d’avec réalisme classique qui prétend que l’Etat est le seul véritable acteur international, que les rapports internationaux sont principalement composés de rapports intergouvernementaux, et qui ne descend pas au niveau des interactions à l’intérieur des unités (Etat). L’approche du choix stratégique fait primo des problèmes stratégiques et d’interaction l’unité d’analyse. L’interaction entre deux ou plusieurs acteurs constituant l’unité d’analyse pourvoit une meilleure compréhension des relations internationales. Secundo, elle fait la distinction entre l’acteur et son environnement (« actors are difined by the préférences and beliefs they hold, and the environment is disaggregated into the set of actions and the information available to the actors.[3] »). Cette distinction distingue les choix rationnel des paradigmes traditionnels en Relations internationales tels que le réalisme, le libéralisme ou l’institutionnalisme libéral. Tertio, il s’agit de l’approche méthodologique « to anlyzing strategic problems or, perhaps more accurate, a set of methodological bets about what will prove the productive ways to think about strategic interactions. /…/ the strategic-choice approach is agnostic toward the appropriate level of analysis in international relations, presumes that interactions at one level aggregate into equilibrium perspective, and avoids, when possible untheorized changes in préférences or beliefs as explanations of changes in observed behaviours. [4]»

Contrairement aux autres approches qui mettent accent sur le niveau d’analyse, l’approche du choix stratégique met avant le fait qu’un acteur en relation internationale ou pas adopte le même comportement face à un problème stratégique. « The levels-of-analysis approach tends to obscure this similiarity by emphasing the level at which causes are located, whereas the strategic–choice approach brings this similarity to the force.[5] » Cette position permettra, selon les auteurs, d’intégrer pleinement les Relations Internationales dans la Science Politique.

L’analyse des stratégies des acteurs en situation de décision est négligée par le Libéralisme. Bien qu’il faille reconnaître le caractère éclectique de cette théorie, ses adeptes mettent accent sur les instruments juridiques, les échanges et la communication, l’organisation du régime ou encore les institutions politiques. La primauté du droit international, la constitution, la méthode scientifique et l’organisation capitaliste de l’économie en constituent approximativement la base. Ce n’est pas l’anarchie qui dicte le comportement des souverains mais un système de droit. Bien entendu les libéraux croient que les individus et les organisations internationales jouent un rôle important dans les relations internationales contrairement aux réalistes. Les libéraux contre ces derniers avancent que « l’action internationale de chaque Etat s’explique davantage par le jeu des acteurs sociaux que par l’existence d’un improbable intérêt national que des dirigeants rationnels tenteraient de faire valoir. /…/ La capacité de chaque Etat de réaliser ses préférences dépend donc de la configuration des préférences de l’ensemble des Etats[6] ».

Là encore, le fait de mettre accent sur le jeu des acteurs sociaux, ou de leur prise en compte dans les relations internationales, on est davantage susceptible de trouver nombre de points de convergence entre les libéraux et les tenants du choix rationnels. Or pour les réalistes, tentant de présenter le monde tel qu’il est, les intérêts des Etats s’articulent autour de leur instinct de survie. L’Etat est considéré comme le seul acteur international, les rapports internationaux sont principalement composés de rapports intergouvernementaux. Les acteurs se comportent comme des acteurs unitaires et homogènes. La puissance est une valeur importante. La politique internationale peut être réduite à la guerre, la sécurité des grandes puissances et les concurrences économiques, la montée et la chute de grandes puissances, et la formation et la dissolution d’alliances.

Alors que les tenants des choix rationnels postulent la scientificité de leur approche, des doutes subsistent quant aux prétentions scientifiques du réalisme (Aron, Buzan, Gilpin, etc.). Certains, comme Morgenthau, avancent pour réfuter ce postulat de scientificité que les principes de la science sont « toujours simples consistants et abstraits, le monde social est compliqué incongru et concret[7] », appliquer les principes de la science au monde social est ou bien futile ou bien fatal. Quand les choix rationnels tentent de trouver des points de convergence entre les différentes théories, le Réalisme à travers, notamment l’un des six principes postulés par Morgenthau, met accent sur une différence réelle et profonde avec les autres écoles de pensée. Les réalistes croient qu’il est impossible de juger les actions de l’Etat selon les mêmes critères que les actions individuelles.

L’approche stratégique se veut théoriquement inclusive. Elle assume le fait que les acteurs, bien qu’ils puissent commettre des erreurs, poursuivent leur but du mieux qu’ils peuvent. Les acteurs utilisent les informations à leur disposition, ils ont des préférences (peu importe le cadre où ils interagissent). Il est à noter que selon des tenants de cette approche, « international relations theorists oftent use the terme of préférences in ambigous and conflicting ways, and this has veen a source of considerable confusion[8] ». Les croyances des acteurs influent sur leur préférence. L’accent mis sur la séparation entre les acteurs et leur environnement différencie fondamentalement les choix rationnels des paradigmes traditionnels. L’approche des choix rationnels « presupposes that many important issues in international politics can be studied fruitly by assuming that sbstate actors interact, that this interaction effectively aggregates these actors into states, and that these states, in turn, interact with each other. At the most basic level, individuals are the actors.[9] »

Pour les tenants de cette approche, le Libéralisme et le Réalisme ne traitent pas de l’interaction stratégique « as their focus and unit of analysis, these two principal paradigms, with their numerous variants, and many second- and third-image theories typically share a concern with strategic interaction. As such, these other paradigms are generally compatible with strategic-choice approch.[10] »

Par ailleurs, au lieu de se référer à la nature humaine pour expliquer les causes de la guerre l’approche stratégique préfère se questionner sur les raisons qui feraient que l’Etat choisisse la guerre à la négociation. Cela est dû, en fait, à la « privation » d’information[11]. Mais il faut ajouter « the fact that states have incentives to misrepresent their positions is crucial /…/ to clarify disagreements about relative power or to avoid the miscalculation of resolve[12] ».

Enfin, la différence entre les choix rationnels et les approches traditionnelles s’expriment essentiellement au niveau ontologique et épistémologique. Avec le réalisme la question se pose au niveau de la rationalité prêtée à l’Etat. « Realism has often been paired with the assumption of rational and unitary state actor, but its Relationship with rationalist theorizing has been uneasy, in both classical, powermaximizing and its neorealist and structural variants[13] ».

Renald LUBERICE

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[1] David A. Lake and Robert Powell, Strategic Choice and International Relations, Pinceton, Princeton University Press, 1999, p. 3

[2] ibidem.

[3] Ibidem, p. 4

[4] ibidem.

[5] David A. Lake and Robert Powell, op. cit., P.5

[6] O’Meara, Macleod (dir.), Théories des Relations Internationales. Contestations et résistances, Montréal, Athéna éditions, 2007, P. 104.

[7] Voir O’Meara, Macleod, op. cit., P. 38

[8] David A. Lake et Robert Powell, op. cit. p. 9

[9] Ibidem, p. 14

[10] Ibidem, P. 29

[11] Voir James D. Fearon, « Rationalist explanations for war », International Organization, 49, 3, Summer 1995, pp. 379-414.

[12] Ibidem, P. 391

[13] Miles Kahler, « Rationality in International Relations », International Organization, 52, 4, Autumn 1998, pp. 919-941.

Contribution théorique de Hans Morgenthau dans les Relations Internationales

Avec des auteurs comme Hans Morgenthau, Raymond Aron (tenant toutefois une position plus nuancée que ses contemporains), Kenneth Waltz (fondateur du néoréalisme) et Stephen Walt, Edward Hallett Carr est l’un des principaux penseurs du réalisme[1]. Le réalisme a exercé et exerce encore, dans une moindre mesure, un rôle dominant dans les Relations Internationales et « s’est présenté comme la première tentative d’offrir une véritable théorie générale[2]» dans ce domaine, et en a dessiné « les contours ». Selon Carr « realism enters the field far behind utopianism and by the way of reaction from it[3] ».

Dans The twenty years’ crisis 1919-1939 (1940), Carr pose les fondements d’une « science » des Relations internationales plus rigoureuse, se proposant de rompre avec l’idéalisme de l’entre deux guerre. Il affirme : « The impact of thinking upon wishing which, in the development of a science, follows the breakdown of its first visionary projects, and marks the end of its specifically utopian period, is commonly called realism[4]». Le réalisme est ici mis au centre du débat tout en se frayant un statut scientifique tendant à appréhender, dans les relations internationales, les choses telles qu’elles sont et non telles qu’elles devraient être. Le devoir être est l’objet de la philosophie et non d’une discipline revendiquant le statut de « science ». Citant la Philosophie du droit de Hegel, Carr affirme : « For the realist /…/ philosophy always ‘‘comes too late’’ to change the world[5] ». Il présente le réalisme comme « the necessary corrective to the exuberance of utopianism[6] ».

Carr fait partie, avec Morgenthau, des réalistes classiques de la tradition épistémologique pragmatiste. C’est un « pragmatiste modéré », pour ainsi reprendre les termes de Macleod, A. & O'Meara, D., « qui accepte l’idée que le scepticisme a ses limites et que leur vision [des réalistes] des relations internationales, sans être une vérité absolue, correspond assez bien au fonctionnement des relations entre Etats et constitue la meilleure base pour conduire une politique étrangère[7] ».


Le livre, The twenty years’ crisis 1919-1939 (1940), de l’historien et diplomate britannique est considéré comme l’un des ouvrages fondateurs du réalisme moderne. Il prend en compte d’autres aspects dans les relations internationales bien qu’il mette l’accent sur les aspects politiques. Carr apporte un important apport aux études internationales en, s’appuyant sur la philosophie réaliste de Machiavel, affirmant : « In the first place, history is a sequence of cause and effect, whose course can be analysed and understood by intellectual effort, but not (as utopians believe) directed by ‘‘imagination’’. Secondly, theory does not (as the utopians assume) create practice, but practice theory. /…/ Thirdly, politics are not (as the utopians pretend) a function of ethics but ethics of politics ».

Toutefois, Tout en partageant l’idée (l’ontologie réaliste) que les Etats sont les principaux acteurs du système anarchique international, Carr met en exergue la nécessité de dépasser « la ‘‘stérilité’’ du réalisme et la ‘‘naïveté’’ de l’idéalisme[8] ».

Prédisant que la notion de souveraineté est appelé à devenir de plus en plus flou, Carr fait, comme c’est généralement le cas de la théorie réaliste, « du respect de la souveraineté nationale un véritable principe du bon fonctionnement du système international4[9] ». Il met en exergue la nécessité de ne pas négliger le facteur de la puissance dans les relations internationales, comme on avait souvent tendance à le faire avant la publication de son livre susmentionné. Bien que la puissance soit un tout indivisible en politique internationale, elle est séparable en « puissance militaire », « puissance économique » et « pouvoir sur l’opinion publique ». La nation ou les nations qui réussissent à être dominante-s sont les productrice-s des « théories de moralité internationale ».

Il ne faut pas, selon Carr, confondre éthique individuelle et moralité internationale. Les actions des Etats doivent être jugés selon des critères différents que ceux utilisés pour les actes individuels. Contrairement aux actes individuels, les émotions n’interviennent pas dans les actions des Etats, du moins on ne peut pas raisonnablement leur en attribuer. Une action que le citoyen moyen concevrait comme étant immorale ou amorale si elle avait été posée par un individu peut lui apparaître comme parfaitement morale de la part de l’Etat. En outre l’impératif de l’autoconservation de l’Etat passe avant les obligations morales. Enfin la base sur laquelle aurait pu être fondée une véritable moralité internationale reste une question ouverte.

L’idéalisme selon nombre d’auteurs réalistes a dominé la réflexion sur les relations internationales mais aussi sa pratique tant aux Etats-Unis qu’au Royaume Uni après la première guerre mondiale. « En mettant l’accent sur les possibilités de coopération entre les Etats, la sécurité collective et les effets contraignants du droit international, au détriment d’une politique étrangère plus robuste et moins naïve, les idéalistes auraient créé les conditions qui auraient favorisé la montée des puissances fascistes et l’éclatement de la Deuxième Guerre Mondiale[10]».

L’idéaliste regarde le futur et pense en termes de « spontanéité créative » tandis que le réaliste fouille le passé et réfléchit en termes de causalité. « On the ‘‘scientific’’ hypothesis of the realist, reality is thus identified with the whole course of historical evolution /…/ there can be no reality outside the historical process.[11] ».

L’auteur nous dit toutefois : « All healthy human action, and therefore all healthy thought, must establish a balance between utopia and reality, between free will and determinism.[12] » C’est un principe d’équilibre entre les deux posions qui nous est présenté, bien que l’auteur semble davantage penché du coté du réalisme qui permet de comprendre le fonctionnement réel des relations internationales. Conçu comme étant plus normatif, se basant sur le devoir être, l’idéalisme ne permettrait pas une analyse rigoureuse de la politique étrangère de l’Etat.

Renald LUBERICE

[1] Il faudrait peut être ajouter l’adjectif moderne au terme « réalisme », car les anciens comme Thucydide, sont parfois considérés comme des réalistes. Carr lui même a affirmé « Machiavelli is the first important political realist ». Carr, E.H., 1940. The twenty years' crisis 1919-1939, London: Macmillan and Co.

[2] Macleod, A. & O'Meara, D., 2007. Théories des Relations internationales. Contestations et résistances, Québec: Athéna, p.5.

[3] Carr, E.H., op. cit., p. 81

[4] Carr, E.H., 1940. The twenty years' crisis 1919-1939, London: Macmillan and Co, p. 14.

[5] Car, E.H., op. cit., p. 16

[6] Ibidem. Machiavel s’était, selon Carr, déjà révolté contre l’utopisme dans la pensée politique, lorsqu’il écrit : « It being my intention to write a thing which shall be usefull to him who apprendeds it, it appears to me more appropriate to follow up the real truth of a matter than the imagination of it ; for many have pictured republics and principalities which in fact have never been seen and known, because how one live sis so far distan from how one ought to live that he who neglects what is done for what ought to be done sooner effects his ruine than his preservation », Machiavelli, The prince, chs. 15 and 23 (Engl. Transl., Everymans’s Library, pp. 121, 193), cité par E.H. Carr, op. cit., p. 82.

[7] Macleod, A. & O'Meara, D., op. cit. p. 11

[8] Ibidem, p. 43

[9] Ibidem, p. 45

[10] Macleod, A. & O'Meara, D., op. cit., p. 20

[11] Carr, E.H., op. cit. p. 85

[12] Carr, E.H., op. cit., P. 17



dimanche 31 janvier 2010

Carte de risque sismique de l'ile d'Haïti

Carte de risque sismique de l'ile d'Haïti

samedi 30 janvier 2010

La stupidité a désormais un nom, elle s'appelle Georges Samuel Antoine, consul haïtien au Brésil

La stupidité a désormais un nom, elle s'appelle Georges Samuel Antoine, consul haïtien au Brésil.

Scandale autour des déclarations d’un diplomate haïtien au Brésil

vendredi 29 janvier 2010

P-au-P, 28 janvier 2010 [AlterPresse] --- Un scandale a éclaté autour des déclarations du consul haïtien au Brésil, Georges Samuel Antoine, qui a affirmé que le séisme du 12 janvier a été bénéfique pour son pays et que l’héritage culturel africain d’Haïti est une malédiction.
Le tremblement de terre est « bon » pour Haïti parce que grâce à lui « nous sommes plus connus », déclare le diplomate. Il ajoute que « tout lieu habité par des africains est maudit », selon ce que rapporte le correspondant du quotidien espagnol El Pais à Rio de Janeiro.
Ignorant que les microphones étaient ouverts, le diplomate s’est laissé aller peu avant d’accorder une interview.
Georges Samuel Antoine assimile la mort soudaine de près de 200.000 personnes et la destruction d’innombrables biens à un bon catalyseur de publicité.
Selon lui, la cause du séisme du 12 janvier est à chercher dans la pratique du vaudou. Les Haïtiens et Haïtiennes « pratiquent tant le vaudou qu’ils ne comprennent plus ce que cela représente. L’africain en soi est porteur de malédiction », renchérit-il.
Au Brésil où les pratiques vaudou existent également sous la forme du Macumba, l’on s’attend à ce que le gouvernement haïtien prenne position contre ces propos considérés comme une injure au peuple haïtien et aux Africains.
Georges Samuel Antoine a présenté des excuses, tout en affirmant que ses propos ont été mal interprétés. Le diplomate, qui vit au Brésil depuis 35 ans, a également prétendu ne pas maitriser le Portugais. [kft gp apr 29/01/2010 12:00]

vendredi 29 janvier 2010

Brady, H.E. & Collier, D., 2004. Rethinking social inquiry. Diverse tools, shared standards, New York: Rowman

Brady, H.E. & Collier, D., 2004. Rethinking social inquiry. Diverse tools, shared standards, New York: Rowman and Littlefield Publishers.

Par Renald Lubérice


Cet ouvrage constitue véritablement une réponse au livre de S. Verba, R.O Keohane, G. King, Designing Social Inquiry: Scientific Inference in Qualitative Research. Les termes de l’ouvrage que nous commenterons sont : La recherche scientifique, « Problemation » et théorisation déductive (76), le compromis.

La recherche scientifique (p. 22) suppose, au premier abord, la capacité à faire une certaine opération mentale permettant de tirer une conclusion (qui peut être provisoire) à partir d’une série de propositions considérées comme étant vraies. Autrement dit, elle tend à faire des inférences en essayant de déduire à partir de données immédiates quelque chose de plus large qui n'est pas directement observé (ou observable). L’idée d’inférence est ici centrale.

Ensuite, une autre caractéristique de la recherche scientifique est qu’elle révèle publiquement ses modalités de travail, en précisant comment les cas ont été sélectionnés, comment les données ont été recueillies, etc. c’est important, voire nécessaire, pour que la recherche puisse être soumise au jugement de la communauté scientifique. C’est, entre autre, à partir de ces éléments qu’elle en jugera les qualités et la plausibilité des conclusions.
Citant S. Verba, R.O Keohane, G. King, Designing Social Inquiry: Scientific Inference in Qualitative Research, Brady, H.E. & Collier, D. affirment « If analyst do not report how they conduct their research, then ‘‘ [w]e cannot evaluate the principles of sélection that were used to record observations, the way in wich observations were processed, and the logic by wich conclusions were drawn » (p.23).

L’accent est également mis sur le degré d’incertitude des inférences en sciences sociales. L’aspect de l’évaluation de la recherche scientifique est avant tout la méthode utilisée. C’est probablement l’un des aspects distinctifs entre le travail du chercheur en sciences sociales et celui du journaliste qui, lui, n’est pas tenu de révéler ses sources ni ses méthodes.

Quant à ‘‘la’’ vérité scientifique, qu’il s’agit des sciences dites dures ou celles dites molles, il faut, à notre sens, la considérer dans sa « provisoirité ». Toute vérité scientifique est provisoire, car elle susceptible d’être remise en question par une nouvelle vérité. Le géocentrisme a été la vérité jusqu’à ce que l’héliocentrisme ne vienne le remettre en question. La recherche scientifique ne devrait faire l’économie de cette donnée inhérente à la nature même de la science, au-delà des distinctions entre différents « types » de sciences.

« Problemation » et théorisation déductive (76) : Tout comme dans les sciences naturelles, l’inférence se révèle plus efficace en procédant primo à l’élaboration d’un modèle claire tout en formulant des hypothèses de travail, secundo en testant les « implications déductives » de ce modèle tout en mettant particulièrement accent sur les implications apparaissant a priori les moins plausibles, tertio en mettant à l’épreuve (empirie) ces implications a priori non plausibles.

Il s’agit là d’une proposition de rigueur qui ne s’éloigne pas, du moins dans l’esprit, des Règles de la méthode sociologique (1895) durkheimiennes. L’exemple cité ne cache pas un penchant à considérer un « fait social », objet du travail du politiste, comme une chose. La Théorie de Relativité d’Einstein est pris par les auteurs comme exemple classique versus le modèle classique newtonien.

Toutefois Ronald Rogowski conclut : « DSI, I contend, emphasizes the third part of scientific inquiry, the rigorous testing of hypotheses, almost to the exclusion of the first two - the elaboration of precise models and deduction of their (ideally, many) logical implications - and thus points us to a pure, but needlessly inefficient, path of social-scientific iquiry. » (77)

Compromis (221): Dans la méthodologie en science sociale, toutes les bonnes choses ne vont pas nécessairement de paire. D’où la nécessité de compromis que prônent les auteurs dans les recherches en sciences sociales. Cette idée est également exprimée par John Gerring (2001), Social Science Methodology : A criterial Framework. Travailler avec des concepts, développer des propositions et mener des recherches impliquent l’existence de terrain d’ententes entre les différents chercheurs de la discipline, au-delà des écoles qui, parfois, peuvent s’apparenter à de véritables chapelles (voir Salvador JUAN, Méthodes de recherche en sciences socio-humaines. Exploration critique des techniques. Paris, Presses Universitaires de France, coll. Le Sociologue, 1999).

Proposant des compromis méthodologiques, les auteurs soulignent que Gerring avait déjà proposé des compromis quant aux concepts de différenciation, d’opérationnalité, de familiarité, de résonance, d’utilité théorique, etc. Toutefois le compromis ne doit pas avoir d’incidences négatives sur le but poursuivi par le chercheur. Il doit se faire dans le respect des outils théoriques utilisés.

S’il faut incontestablement une « méthodologie standard » qui puisse faire office de terrain commun aux différents chercheurs en sciences socio-humaines – Juan propose le terme Sciences Socio-humaines en vue dépasser le clivage entre sciences humaines d’une part et sciences sociales de l’autre – il est un versant du problème qui est lié à la nature même de l’objet. Notre objet d’étude est étonnamment mouvant et ce sont de surcroît des « êtres parlants » ou des objets produits par eux et par leurs interactions. Nous sommes à la fois sujet et objet des sciences « socio-humaines ». Ces différents facteurs peuvent concourir à donner une explication satisfaisante des difficultés rencontrées.

Par ailleurs une bonne partie de l’impossibilité du compris pourrait provenir des différentes visions que les chercheurs ont eux-mêmes de la réalité et du monde, visions qui ne sont pas sans interférences sur nos choix méthodologiques et épistémiques. Dire que les sciences socio-humaines peuvent être une science dans la mesure où on peut mener des Enquêtes, qu’il existe une relation avec l’empirie, qu’on peut faire de l’expérience et après généraliser (voir Mortimer J. Adler, 1993. The four dimensions of philosophy. Methaphysical moral objective categorical) ou, à l’inverse dire qu’on ne peut pas faire tout cela, procède de visions spécifiques du monde. Peut-être en reconnaissant que nos approches méthodologiques ne sont pas totalement neutres, nous serons conduits à systématiser la « réflexivité » (P. Bourdieu) dans nos entreprises scientifiques.

dimanche 24 janvier 2010

samedi 16 janvier 2010

Pour Welmid Ravix

Mi Hermano, mi monje, mi anacoreta…

A tout jamais, me dire que tu disparais? Toi, Welmid ? Non, je ne peux pas… Non. Je ne pourrai pas !

Tu es de ces êtres si précieux, si rares que nul n’acceptera de perdre. Je ne peux pas… je ne veux pas te perdre. Tu as été mon frère, mon ami, mon confident. Tu es mon frère, mon ami, mon confident. Tu seras mon frère, mon ami, mon confident. Cette affreuse douleur, cette pénible existence ne me laisse guère les mots. Des mots qui seraient de toute façon impuissants à décrire mes maux.

Je t’aime !

J’ai envie de le crier à la face du monde entier. Si seulement toi, tu pouvais l’entendre… Fort aurais-tu voulu que je sois, mais la force me fait défaut.

Welmid L’IRREMPLAçABLE

C’est grâce à toi que j’ai su que la bonté, la sincérité, l’amitié, la ténacité et toutes ces choses rares que n’arrive plus à énumérer existent. Je l’ai su, parce que tu étais, tu es et tu seras toujours tous les adjectifs dérivés de ces noms. Que dis-je ? Tu es ces noms !

Tu as tellement de qualités, que tu as d’ailleurs toujours voulues me transmettre. Je n’en ai jamais été, néanmoins, à la hauteur. Ce qui t’arrive, ce qui m’arrive, ce qui nous arrive rappelle combien la vie est éphémère, combien fragile est-elle.
Pour ton fils Wedson, je tacherai d’être là. Bien que je sois véritablement impuissant et que je ne pourrai jamais faire tout ce que toi, si les rôles avaient été inversés, tu aurais pu faire.

Seulement, je te fais une dernière promesse avec sincérité, comme on a toujours su l’être l’un envers l’autre, que tu restes et resteras gravé à tout jamais dans ma mémoire, dans mes pensées, dans mon cœur… Si ce n’est pour toujours, du moins le restant de mes jours…

Ton R-Lub, ton hermano
Nunca te olvidare !!!!

Mi Hermano, mi monje, mi anacoreta…

A tout jamais, me dire que tu disparais? Toi, Welmid ? Non, je ne peux pas… Non. Je ne pourrai pas !

Tu es de ces êtres si précieux, si rares que nul n’acceptera de perdre. Je ne peux pas… je ne veux pas te perdre. Tu as été mon frère, mon ami, mon confident. Tu es mon frère, mon ami, mon confident. Tu seras mon frère, mon ami, mon confident. Cette affreuse douleur, cette pénible existence ne me laisse guère les mots. Des mots qui seraient de toute façon impuissants à décrire mes maux.

Je t’aime !

J’ai envie de le crier à la face du monde entier. Si seulement toi, tu pouvais l’entendre… Fort aurais-tu voulu que je sois, mais la force me fait défaut.

Welmid L’IRREMPLAçABLE

C’est grâce à toi que j’ai su que la bonté, la sincérité, l’amitié, la ténacité et toutes ces choses rares que n’arrive plus à énumérer existent. Je l’ai su, parce que tu étais, tu es et tu seras toujours tous les adjectifs dérivés de ces noms. Que dis-je ? Tu es ces noms !

Tu as tellement de qualités, que tu as d’ailleurs toujours voulues me transmettre. Je n’en ai jamais été, néanmoins, à la hauteur. Ce qui t’arrive, ce qui m’arrive, ce qui nous arrive rappelle combien la vie est éphémère, combien fragile est-elle.
Pour ton fils Wedson, je tacherai d’être là. Bien que je sois véritablement impuissant et que je ne pourrai jamais faire tout ce que toi, si les rôles avaient été inversés, tu aurais pu faire.

Seulement, je te fais une dernière promesse avec sincérité, comme on a toujours su l’être l’un envers l’autre, que tu restes et resteras graver à tout jamais dans ma mémoire, dans mes pensées, dans mon cœur… Si ce n’est pas pour toujours, du moins le restant de mes jours…

Ton R-Lub, ton hermano

mardi 12 janvier 2010

réप : science et idéologie

Cher-ère-s ami-e-s,

D’un excellent esprit de synthèse, Paul Angeline a mis en exergue les points essentiels de la discussion en cours relative à l’épistémologie et le parallèle (le lien, suis-je tenté de dire) entre science et idéologie. L’épistémologie est ici prise dans un sens plus large que l’« épistémé » foucaldien. Schématiquement pour Foucault l’épistémologie est l’étude d’un « corps de principes », analogues aux paradigmes de Kuhn et dont la variation avec le temps se fait de manière discontinue. Elle concerne en même temps une pluralité de discipline. Ici j’entends précisément, à la suite de Barreau, par Epistémologie l’étude de nos connaissances scientifiques ou plutôt l’étude des sciences. Le lecteur intéressé par cette question peut consulter le « Que sais-je » des PUF, L’épistémologie, par H. Barreau.

Angeline affirme judicieusement, car c’est aussi mon point de vue, sur les traces de Ray : « tout ce qui est scientifiquement possible n’est pas forcément politiquement admissible ou autorisé, d’où l’intervention du profane pour dire stop ». La systématisation de cette question : « est-ce la science qui est idéologique ou les applications de la science ? » me convient parfaitement et nous permettra de prolonger la discussion sur une très bonne base, si vous le désirez.

La nature du sujet abordé peut naturellement ne pas susciter le même engouement qu’une discussion dont l’objet est la formation du nouveau gouvernement qui remplacera le gouvernement actuel une fois que Préval aura démissionné (c’est évidemment de l’hérésie, du messianisme primaire !). Mais je suis convaincu qu’il peut participer du dessein de la nouvelle Haïti.

Loin des affirmations péremptoires, Ray apporte une contribution documentée à la discussion qui met en évidence une grande culture scientifique sans qu’il n’ait besoin d’écrire « Dr. ou PH. D. » systématiquement devant son nom. Il a apporté des précisions et des corrections quant à l’appréciation de la théorie de la relativité générale d’Einstein, dont j’ai fait mention dans mon précédent texte, au moment de son édification. Je l’en remercie.

Quant à Vava, malgré tout ce qu’on peut penser à propos de son humilité affichée –qui au passage est loin, très loin d’être humble – il est chez lui une qualité qui, si chacun de nous pouvait la cultiver, fera le plus grand bien à notre chère Haïti : il n’insulte jamais ses contradicteurs (du moins pas à ma connaissance), il est capable de les féliciter quand il se retrouve dans leurs propos. A quoi bon de cultiver la rancune et l’arrogance ? Nous pouvons ne pas être d’accord sur un sujet et l’être sur un autre. C’est le but de la discussion. Comment peut-on avoir le culot de se faire appeler docteur et ne pas être capable de comprendre cette règle basique de la critique : on critique le texte de l’individu, son opinion mais pas sa personne.

Je reviendrai sur la question de la science et de l’épistémologie.

Bien cordialement

Renald LUBERICE
12 janvier 10

samedi 9 janvier 2010

science et Idéologie : la touche de Ray

Amis-lecteurs,
Renald,
Guichard,

Encore de très intéressantes réflexions de Renald qui ne cesse depuis quelques temps de nous transporter dans de plus hautes sphères de la pensée. Je l'en remercie infiniment. Ce genre d'échanges apporte un démenti flagrant à ceux qui pensent que nous sommes incapables de penser sans Google ou de composer toute pensée cohérente sans plagier. Comment peut-on entretenir de tels préjugés vis-à-vis de professionnels haïtiens qui produisent du savoir, du savoir-faire dans les boîtes occidentales et qui sont à l'avant-garde de la spécification des nouvelles technologies de pointe ? C'est à croire que tout ce qui vient de l'Haïtien ne peut être que du réchauffé sans originalité aucune. Ce genre d'attitude traduit le mépris inculqué sur les bancs de l'école élitiste haïtienne où l'esprit déformé par la formation importée glorifie tout ce qui est étranger au détriment de ce qui provient de l'Haïtien. C'est là un trait étranger aux Chinois et aux Indiens avec lesquels j'ai travaillé toute ma vie et qui croient en leur capacité à faire entendre leur propre voix parmi les premières du monde. Ceux qui sont vraiment cultivés apprécieront avec respect les efforts de réflexion et de composition de leurs compatriotes qui les invitent à la réflexion sérieuse sur des sujets divers. Bref, passons à ce débat science-idéologie.

Je dois noter toutefois, avant d'aborder le vif du sujet, que le prix Nobel de 1921 décerné à Einstein en 1922, ne fut nullement une acceptation de sa théorie (relativité générale) que seulement une poignée de physiciens comprenaient vraiment à l'époque. La relativité générale n'a jamais été célébrée par un prix Nobel par jalousie, mauvaise foi, antisémitisme et obscurantisme combinés des savants du comité Nobel. Le prix de 1921 lui fut décerné pour ses "services à la physique théorique (theoritical physics) et surtout pour sa découverte de l'effet photoélectrique" qui n'est qu'une goutte dans l'océan par rapport au monument éternel qu'est la relativité générale. Les membres du comité du Nobel étaient incapables d'apprécier la relativité que l'un de leurs membres, le détracteur le plus perfide et le plus puissant d'Einstein, Philipp Lenard se plaisait à dénigrer. De fait, quand un journaliste approcha Sir Arthur Eddington au sujet de la relativité, il lui demanda :

-- On dit qu'il n'y a que trois physiciens sur Terre à comprendre la relativité générale (1915), Einstein, un autre et vous.
-- Je ne connais pas l'autre, répondit Eddington, pour signifier qu'on était aux cîmes glaciales de la pensée humaine.

(Un peu exagéré, mais proche de la réalité.)

La théorie de la relativité demeure toujours difficile. On ne l'enseigne d'ailleurs pas dans le cursus du premier cycle universitaire (B.S.) où Newton est toujours de vigueur même dans les écoles polytechniques. On enseigne Newton à l'école secondaire, car l'univers newtonnien est un modèle mathématique effectif de notre univers de tous les jours même s'il manque de précision en Cosmologie. C'est pour cela que les écoliers du secondaire et la majorité des étudiants des premier et deuxième cycles universitaires sont enseignés et régurgitent des concepts érronés tels, par exemple, cette notion de force gravitationnelle (pesanteur) qu'exerceraient deux corps célestes l'un sur l'autre et la Terre sur tout être ou object dans son champ; il n'en est rien. Einstein a renversé ce concept de force en le remplaçant par l'effet due à la courbure de l'espace-temps (the curvature of space-time), elle-même causée par l'énergie sombre et la matière (sombre et visible) ambiantes. Pour Newton, l'espace (3 dimensions) et le temps ne participent pas aux événements de l'univers. Pour Einstein, ils en font partie inhérente, acteurs de tout décor; il remplace le temps absolu de Newton par le temps personnel; ce qui importe est le mouvement relatif des objects. Deux observateurs qui se déplacent l'un par rapport à l'autre ont chacun leur propre temps. C'est d'ailleurs ce qu'illustre le paradoxe (qui n'en est pas un) des frères jumeaux (twin paradox); un qui reste sur Terre et l'autre qui voyage à la vitesse de la lumière vers le Cosmos en direction de l'Alpha du Centaure, l'étoile la plus proche de notre étoile solaire. Celui qui voyage retourne environ 4 ans 2 mois plus jeune que celui qui reste sur Terre.

Quand l'église catholique voulut passer à la vitesse supérieure au-delà de la preuve scientifique d'un commencement de l'univers pour prouver l'existence de Dieu, le Vatican a voulu utiliser les résultats de George Lemaître (atome premier/primeval atom).

Cependant, ces remarques prouvent-elles que la science se fait mal ? Pourquoi ne remplace-t-on pas Newton à l'école (là où il avait tort) ? Tout simplement parce qu'au delà des concepts erronés, Newton est toujours effectif pour nos besoins quotidiens, même quand, par exemple, son modèle prédit seulement la moitié de ce que la déviation de la lumière devrait être dans le champ gravitationnel solaire. Alors que le modèle d'Einstein la prédit correctement. Il faudrait qu'on réécrive tous les livres de physique. Mais à quoi bon ? Quand l'église s'appuyant sur la preuve scientifique d'un commencement (Big Bang), pour prouver l'existence de Dieu, la science est-elle imputable ?

Doit-on blâmer la science ou les scientifiques ou ceux qui influencent ces derniers ? Pour répondre à cette question, il faut d'abord se demander qu'est-ce que la science ? La définition adoptée par la majorité des scientifiques nous vient de celui qui est considéré comme le plus grand philosophe de la science, Karl Popper. Cependant, il est préférable avant de comprendre la démarche de Popper de revoir comment Popper est interprété par Stephen Hawking, professeur Lucasien de mathématiques à Cambridge et celui qui avec Roger Penrose a établi que les équations d'Einstein montrent que l'univers a un commencement dans le Big Bang (the primeval atom de George Lemaître du Vatican) et une fin : "Une théorie scientifique est un modèle mathématique qui décrit et codifie nos observations. Une bonne théorie décrit une multitude de phénomènes sur la base de quelques postulats simples et fait des prédictions qui peuvent être vérifiés. Si les prédictions sont en accord avec les observations, la théorie survit ce test, quoiqu'on ne puisse jamais prouver qu'elle est correcte. Si les observations contredisent les prédictions, la théorie doit être rejetée ou modifiée. (C'est ce qui devrait se passer. Cependant, dans la pratique, on questionne souvent la qualité des observations et la fiabilité et le caractère moral de ceux qui les conduisent.)" (Stephen Hawking, The Universe in a Nutshell, Cambridge, May 2, 2001).

Cet énoncé de Stephen Hawking illustre bien la philosophie de la science de Popper qui se base sur le caractère réfutable de la théorie scientifique. Toute assertion ou théorie ne peut être scientifique que si elle est capable d'être réfutée par l'observation, c'est-à-dire si on peut la tester. Si on accepte une telle définition de la science, une idéologie qui établit sa vérité indiscutable ne peut pas être scientifique car elle ne permet pas qu'on la réfute. Une idéologie de la science ne serait pas non plus scientifique (???)

Par exemple, l'attitude du Vatican visant à prouver par la science l'existence de Dieu participe de l'influence religieuse sur la conduite du scientifique. La proposition que notre univers n'est qu'un parmi tant d'autres d'un multiverse passe-t-elle le test de Popper ? Les "clinical trials" des grandes firmes pharmaceutiques ou de biotechnologie sont-ils à l'abri des influences de ces dernières ? Dans tous ces cas, il s'agit d'interventions externes relatives à la méthodologie scientifique qui peuvent l'altérer et dont les conséquences sont donc susceptibles d'être identifiées et corrigées éventuellement.

Quand les physiciens de la théorie de la gravitation quantique ajoutent 6 ou 7 dimensions supplémentaires qu'ils n'ont jamais observées aux quatre dimensions de la relativité générale, font-ils de la science ou pas ? (Gravitation quantique : théorie qui vise à unifier la relativité générale et la mécanique quantique au voisinage des "trous noirs" [Black Holes] où les deux effets se manifestent.)

Oui, selon Hawking qui déclare que cette théorie et les autres théories rivales telles que Super-string Theory présentent ce qu'on appelle des dualités entre elles qui, si on s'en foutait serait "équivalent à penser que Dieu a placé des fossiles dans les strates géologiques rien que pour induire Darwin en erreur quant à l'évolution des espèces". Et non, selon ceux qui pensent qu'on introduit des dimensions non observables donc non-réfutables selon le critère de Popper. Mais une telle conclusion pourrait se révéler prématurée selon des observations planifiées pour 2010.

Il y a d'autres philosophies de la science telles que celle d'Howson basée sur une approche Bayésienne (ceux qui ont étudié la théorie des probabilités connaissent le théorème de Bayes/conditional probability). En un mot, ici le travail des scientifiques n'est pas de réfuter comme chez Popper mais d'accumuler les évidences en faveur d'une théorie. Et quand il y a des théories rivales comme c'est le cas en physique théorique recherchant une théorie du champ unitaire, les scientifiques les évaluent l'une par rapport à l'autre en accumulant les évidences.

En fin de compte, quelle que soit la philosophie de la science, aucune thérorie scientifique ne peut être acceptée sans l'observation empirique. Et c'est justement ce qui différencie la science des autres activités de la pensée humaine qui restent hermétiques à toute critique. Qu'on l'oriente selon une idéologie ou des intérêts économiques et stratégiques, ce qui arrive d'ailleurs le plus clair du temps, la méthodologie employée reste sujette à la critique, et les observations à la réfutation éventuelle ou la vérification des prédictions. C'est dans cette optique que Renald dit judicieusement : "Il faut concevoir la vérité scientifique dans sa provisoirité. C’était vrai en 1600, c’est encore vrai aujourd’hui et ce sera probablement vrai demain." (Je dirais certainement.)

On ne peut pas dire autant pour l'idéologie. Les idéologies meurent d'ailleurs, mais la science, si elle mourrait, ce serait la fin de l'humain, de la pensée.

Renald poursuit : "Or la principale idéologie de la science constituée est le fait de faire croire qu’elle n’a pas d’idéologie." La science est une idéologie dans le sens qu'il y a une manière de faire la science (méthodologie propre à chaque science) qui n'a pas changé et qui ne se laisse pas changer faute d'alternatives valables jusqu'ici. (Évidemment, après 3 révolutions industrielles spectaculaires qui ont causé la crise de l'environnement, le moment n'est-il pas venu d'apporter de nouvelles dimensions à la pratique de la science ? Une théorie scientifique est-elle acceptable si elle ignore le paramètre environnement ou débouche sur des pratiques qui portent atteinte à notre écosystème ?) L'épistémologie est également idéologie. Nous éduquons nos jeunes scientifiques et ingénieurs dans la manière de pratiquer la science. Il n'y a pas à sortir de là. Par contre, une théorie scientifique n'est pas une idéologie dans le sens que ses démonstrations et ses prédictions restent sujettes à la réfutation ou à la vérification empirique. La théorie scientifique peut être réfutée ou modifiée.

Par contre, l'idéologie n'est pas la science en ce sens qu'elle ne laisse pas changer ses observations, prédictions et représentations. Et ceci même si l'idéologie emprunte une méthodologie scientifique, une fois son modèle formulé, ce modèle est au-dessus de toute critique.

Il faut noter que Thomas Khun (The Structure of Scientific Revolutions) s'était intéressé aux processus historiques qui pourraient permettre à une idéologie de s'adapter à la réalité socio-politique et économique. Cependant, nous savons empiriquement que cela s'est jusqu'ici révélé futile, car la tendance historique générale est que les idéologies meurent et se remplacent à mesure que leurs modèles statiques ne répondent plus aux besoins de la société ou du groupe.

Ray H. Killick

jeudi 7 janvier 2010

Science et idéologie

Science et idéologie

Voilà maintenant deux ans que Dore a publié dans Le Matin l’article intitulé « l’idéologue est il un scientifique?». M’appuyant sur Callon et Latour, j’y ai répondu en mettant accent sur certaines controverses en cours à propos de la sacrosainte neutralité scientifique. Dore a jugé bon de republier sur le net ces articles, ce qui ne peut être que salutaire pour tous ceux et toutes celles s’intéressant à la question. Ray Killick a apporté une judicieuse touche à l’édifice. Je ne m’efforcerai pas ici de contredire ce qui a été judicieusement dit mais de prolonger la discussion.

En effet, la perception, la lecture du réel quadridimensionnel (trois d’espaces et un de temps) qu’est la réalité n’est pas dépourvue d’enjeu de pouvoir, de prestige réel et/ou symbolique. Elle ne l’est pas moins lorsqu’elle est appréhendée par la science. Il faut concevoir la vérité scientifique dans sa provisoirité. C’était vrai en 1600, c’est encore vrai aujourd’hui et ce sera probablement vrai demain.

Lorsque Bruno Giordano adhéra au système de Copernic il fut brulé. Il fut, avant Einstein, des notions physiques qu’on croyait des mieux établies. Pourtant en 1921, la communauté scientifique, à travers le prix Nobel, approuve sa théorie qui bouleversera la physique et le monde.

La position de Giordano Bruno par rapport à la découverte copernicienne fut punie parce qu’elle ne correspondait à « l’idéologie scientifique » ou l’idéologie tout court de l’époque. Elle remit en cause une vérité sur laquelle l’église pensa devoir compter.

J’utilise volontiers ce thème de Ganguilhem, « idéologie scientifique » pour marquer mon opposition à l’opposition tranchée entre Science et Idéologie. Ganguilhem a fait remarquer qu’une idéologie scientifique est une proto-science dans la mesure où elle est immature et qu’elle se repose sur une science constituée. Les méthodes utilisées en proto-science sont approximatives. L’idéologie comble le manque de précisions de la proto-science.

Là où Ganguilhem s’est probablement fourvoyé c’est en laissant entendre que la science constituée du fait de l’utilisation de méthode précise n’a pas d’idéologie. Or la principale idéologie de la science constituée est le fait de faire croire qu’elle n’a pas d’idéologie. La situation est encore plus préoccupante lorsque les sciences humaines et sociales, c’est surtout le cas en Amérique du Nord, « pensent » devoir utiliser des méthodes de sciences dites dures pour se faire une stature de science constituée et de ce fait dépourvue d’idéologie.

La science qu’on croit constituée l’est en fonction des acquis du moment. Il peut ne plus l’être demain. C’était le cas pour la médecine, la biologie et l’anthropologie du XIXe siècle lorsque leurs objets d’étude étaient les non-européens. Pourtant ces sciences-là revendiquaient pour la plupart le statut de science « constituée ».
Du fait qu’on ne fait pas de science pour la science, que la science a des applications sociotechniques, c’est être idéologue que de dire que la science n’est pas idéologique.

jeudi 7 janvier 2010
Renald LUBERICE

dimanche 3 janvier 2010

La politique métaphysique

La politique métaphysique

Les dés sont jetés, dit l’un. Les jeux sont faits, dit l’autre. Les choses vont de mal en pis clame le pseudo analyste. De quelle chose parles-tu, suis-je tenté de lui demander ? Guidé par le sens commun, il m’aurait certainement répondu : toutes les choses, l’éducation, l’insécurité, la production nationale, la Minustah, etc. Il n’est pas ainsi guidé par ses observations, mais d’un certain habitus régi par l’affect qui fait que l’analyse de la chose ne se fait pas à partir de ce qui se voit, ce qui s’observe mais des idées générales, transmises au fil des ans, qui veulent que de toute façon rien ne peut s’améliorer en Haïti. Le temps et l’action sont faits pour détériorer les choses, le bilan du vivre ensemble ne peut être que négatif. C’est la vérité, leur vérité. Point n’est besoin de dissocier dans l’ensemble des actions d’un individu et/ou d’un groupe d’individu les actions positives des négatives. L’objet du discours de l’analyste n’est pas la réalité de mon pays, mais lui-même.

L’opposition politique et le discours politique procède des mêmes schèmes. Le programme d’un candidat à la présidence sera Exempli Gratia : l’éducation, l’insécurité, la production nationale, peut être le tourisme aussi. C’est ce qui se dit à la radio et ailleurs, alors le dit-il également. Lui demandant qu’est-ce qu’il compte faire au juste pour améliorer l’éducation des haïtien-n-e-s ? Combien cela coutera-t-il ? Pour quel résultat ? Sur combien d’années ? Comment compte-t-il procéder ? D’où proviendront les fonds ? etc. il marmotte ou bredouille. Ainsi sera-t-il pour tous les autres thèmes.

N’ayant cure de la réalité, le discours de l’analyste susmentionné, celui de l’opposition et/ou du candidat procède d’une même métaphysique politique : la divagation. Puisque la réalité observable n’est pas prise en compte dans leurs analyses et dans l’offre politique, tous les discours se valent (tout voum se do). On ne mesure pas les cotes de popularité de tel ou tel homme politique, de telle ou telle proposition ou position politique, on traite des choses politiques comme on traite des affaires relatives à l’invisible et à l’au-delà.

Le meilleur exemple en date est la posture de certaines personnalités politiques ou de certains regroupements politiques face au Président Préval et son « Inite ». Préval s’apprête à voler les élections grâce à l’aide d’un CEP (Conseil Electoral Provisoire) soumis, nous disent-ils. Considérons provisoirement que ce postulat soit fondé.
Vu le passé de Préval, on peut croire qu’il est capable de tramer un tel complot. Car dans les années 2000, il s’est arrangé avec Aristide en vue de l’organisation d’élections truquées au profit de ce dernier. Cela a provoqué de graves problèmes et réintroduit une nouvelle mission des Nations Unies.

Mais pourquoi Préval voudrait-t-il refaire ces mêmes choses ? Telle est la question qu’on devrait se poser. Soit Préval est politiquement faible, dans ce cas là, pour gagner les élections il faut qu’il triche. Soit il est politiquement moyen, et vu ses ambitions politiques, il lui faut une majorité parlementaire confortable pour parvenir à réaliser ses objectifs. Si on considère que Préval est fort politiquement, il peut donc gagner. Ce serait crétin de sa part de vouloir tricher alors qu’il peut gagner. Sachant que la tricherie et la légitimité politique ne font pas bon ménage.

Au-delà des considérations métaphysiques sur quoi l’opposition (qui en réalité n’en est pas une) peut-elle se baser pour répondre à cette question ? En gouvernement représentatif, on se base sur des enquêtes de qualité. On sonde les cotes de popularité, on demande aux électeurs leur avis sur tel ou tel homme politique.
Si Préval est faible, cela voudrait-il dit dire que « l’opposition » est forte ? Comment peut on le savoir si cette opposition n’a pas d’offre politique ? Dire qu’il faut que la situation de la population soit améliorée, qu’il faut donner du travail au chômeur, résorber l’insécurité et la corruption, n’est pas une offre politique. C’est du blablabla, de la métaphysique. N’importe quel crétin peut le dire, et tout le monde sera d’accord. Il faut des chiffres e
t des propositions concrètes qui puissent cristalliser une opposition réelle.
Admettons que je sois considéré comme faisant partie des haïtien-n-es moyens. Si, moi, je ne suis pas capable de percevoir l’offre politique de l’Inite, de l’Alternative ou d’une autre plateforme électoraliste, croyez-vous que nos compatriotes dont la plupart ne savent ni lire ni écrire sauront le faire ?

Pour finir, revenons à notre postulat de trucage électoral manigancé par Préval. Posons la question suivante : si Préval ne triche pas, « l’opposition » sera-t-elle en mesure de gagner les élections ? (J’espère que les opposants auto-déclarés sauront y répondre). En fait, qui sont aujourd’hui les opposants de Préval ? Lavalas (exclus des législatives) et l’Alternative ? Au-delà de la métaphysique politique, cette opposition-là a-t-elle une offre politique valable à faire qui puisse avoir l’adhésion du plus grand nombre ? Rien n’est moins sûr !

Messieurs ne nous dites plus qu’il faut changer Haïti, ça nous le savons déjà. Dites-nous plutôt comment vous comptez vous y prendre.

Renald LUBERICE
3/01/2010